Lorraine, Terre d'artistes

Chers amis, 

Artlorrain.com a recensé un nombre considérable d'artistes qui a peuplé la Lorraine dans la période comprise entre les années 1700 jusqu'à nos jours, allant du plus invisible d'entre eux jusqu'aux plus prestigieux. 

Ce recueil de données comprend  leurs biographies qui s'articulent avec la compilation de leurs oeuvres vendues tous les jours en France et à l'étranger et, à ce jour, nous ne sommes plus très loin de 12 000 oeuvres recensées. Quelques uns de ces artistes, à la notoriété certaine sont connus du plus grand nombre de français et figurent en bonne place dans les collections de bien des musées européens  : Paris, Berlin, Londres, Rome, Madrid .... Qui ne connaîtrait pas des figures de proue comme Georges de la Tour, Jacques Callot, Claude Gellée, Jacques Majorelle, Emile Gallé ?...

Indépendamment de cet aperçu cité au hasard, il y a bien d'autres talents concernant la peinture classée et moderne classique qui auraient pu figurer aussi dans notre texte. Et puis d'autres artistes encore, d'une visibilité moindre aux oeuvres  néanmoins intéressantes qui nous restent à découvrir.
Notre intérêt pour tous ces hommes et toutes ces femmes, sans exception, n'est plus à répéter ; à terme, notre rêve serait de partager cette passion avec Vous : musarder, regarder, apprécier, échanger une idée, partager un sentiment à propos de leurs oeuvres recensées, enrichir une biographie ou en corriger une erreur de datation par exemple.  

Mais parler des peintres et graveurs ne saurait se faire sans parler du contexte historique, social, économique de la terre où ils sont nés tant il est vrai qu'à nos yeux l' "Art" ne peut être "coupé" de la Société de laquelle il émerge . Ce lien entre "Art" et "Société" est indissociable pour comprendre "en profondeur" le langage intérieur de l'artiste afin d'appréhender l'oeuvre qu'il donne à voir.
A l'envers, l'oeuvre qui se donne à voir est "miroir" d'un questionnement des représentations sociales qui s'y rapportent. Cette démarche de pensée implique donc la reconnaissance de l'oeuvre d'art comme un mode d'expression privilégié de la pensée, non seulement d'un individu donné, son producteur, mais de cet individu en tant qu'il est un être social, et qu' à travers son geste, son émotion, c'est un collectif qui trouve une expression. Pour P. Francastel, historien d'art et sociologue, l 'analyse ne consiste pas à étudier seulement l'oeuvre pour elle même, mais à décrire et comprendre le processus de sa lisibilité sociale. Arts et technique aux XlXe et XXe siècles, Paris, Gallimard, 1956.

La Lorraine

 Voilà en tout cas pour nous une raison de nous imprégner d'un peu d'histoire de cette Lorraine qui a façonné et "buriné" les hommes, un peu à l'image de ses paysages et de son climat.
L'auteur que nous avons cité au paragraphe précédent nous rappelle que "L'oeuvre d'art est le produit unique d'une activié qui se situe à la fois, sur le plan des activités matérielles et des activités imaginaires d'un groupe social donné".

Mais, vouloir évoquer la Lorraine dans ses lignes les plus marquantes, "dessiner" à grands traits ce qui a "favorisé" l'émergence de tant d'artistes, pose d'abord la question des limites : A travers la densité du sujet, de quoi allons-nous parler?  
Quelles périodes allons nous privilégier pour ce faire ?
La Lorraine ducale, la Lorraine industrielle,  la Lorraine de l'immigration?
Quelle méthode de travail allons nous donner à cette entreprise pour rendre compte de nos données ?  

A nouvel exercice, autres outils ; pas de longs paragraphes ni tièdes anecdotes, mais plutôt une succession de "séquences", une suite "d' images", de "scènes" formant un ensemble.  Celles- ci n'offriront pas une redite des brochures spécialisées, mais une mise en forme stylisée, épurée, susceptible de construire un imaginaire commun. 
Sur un thème ou sur un autre se rattachant à la Lorraine, nous illustrerons nos propos par des morceaux choisis d'auteurs. De semaine en semaine, parions que l'assemblage de la mosaïque laissera apparaître à nos lecteurs le profil de la Lorraine qui permettra à chacun de s'approprier un morceau d'histoire de notre région.

1 - Lorraine de guerre, de fer et de sang

Prise en étau entre l'empire germanique et le royaume de France, cette bande de terre indépendante transmise à Lothaire en 843 par le traité de Verdun a toujours attisé, de par sa position géographique, la convoitise de ses puissants voisins. Sorte de couloir et de passage très stratégique, la Lorraine fut dès lors le théâtre de nombreux affrontements. Quand bien même le Duc Antoine de Lorraine obtint que celle-ci soit reconnue "Etat libre et non incorporable" par le traité de Nuremberg en 1542, la Lorraine ne tardera pas à connaître les pires horreurs de la guerre de Trente ans décrite en 18 tableaux par Jacques Callot.

De 1618 à 1648, la guerre embrase l'Europe, entraînant disette et maladies... En 1633, les français occupent la Lorraine avec pour alliés des mercenaires suédois qui sévissent à leurs côtés ; mal payés, ou pas payés, ils rançonnent et commettent les pires horreurs. 
Mais du côté lorrain, les soldats, alliés avec les hongrois et les croates, vivent la même situation : ils sont mal payés ou non payés .... Ils rançonnent le pays qu'ils avaient à défendre, et commettent les pires horreurs : ravagent, pillent, brûlent ....  
Les lorrains, dans une extrême misère prennent le parti de vivre de brigandages....
 "Passé le coude que fait la grande rue qui divise G. en deux - de chaque côté, une enfilade de longues et basses fermes  comme c'est ainsi en pays d'Est -, nos yeux découvrirent alentours combien de choses cruelles?
Aux maisons de droite, des contrevents étaient ouverts qui laissaient voir à l'intérieur tout un remue-ménage et quelquefois un corps ou deux, disloqués et rougis. Parfois même, telle une chiffe, un homme était pendu du long dans son jardin, ou brûlé à un arbre, un autre avait été brutalisé et privé des oreilles et du nez, et des femmes de tous âges , des petites et des vieilles, forcées avant que de leur retirer la vie".
 Thierry Hesse co-auteur de l'ouvrage "De la Lorraine" qui a fait suite à l'exposition singulière sur le thème de "La Lorraine" ed. Hazan organisée conjointement et simultanément au Musée de Metz et au musée des Beaux-Arts de Nancy en 2007 

En 1648, la Lorraine aura perdu les 3/4 de sa population.

Vous trouverez la suite du récit semaine prochaine.
A bientôt 
Robert Leterrier